dimanche 4 juillet 2010

Retour au jardin

Nous avons revu hier soir ce chef-d'oeuvre venu d'Italie du vieux maître Vittorio De Sica, Le Jardin des Finzi-Contini, l'un des derniers films du fameux réalisateur du Voleur de bicyclette. Ce diamant noir à l'ambiance tchekhovienne, poignante, nous montre les derniers feux d'un monde finissant : une bourgeoisie et une petite bourgeoisie de juifs italiens, exclus des clubs sportifs de la ville de Ferrare mais protégés des agressions du monde dans ce merveilleux jardin des Finzi-Contini où ils poursuivent leur tennis, et tous bientôt balayés comme fétus de paille par la Solution Finale... Ceci bien en dépit de leur parfaite assimilation ou de leur adhésion sans faille au fascisme mussolinien. Et malgré ce jardin enclos, illusoire paradis (faut-il rappeler que le mot "paradis" est issu d'un mot persan qui signifie "jardin clôturé" ?).
Il faut avoir vu la séduisante Dominique Sanda, qui incarne Micol, fleur vénéneuse promise à l'extermination, dont la terrible froideur sauvera, contre toute attente, son ami d'enfance...
Il faut avoir vu cette famille de quasi-aristocrates, les Finzi-Contini, descendre avec dignité les marches de leur magnifique propriété avant de partir en déportation...
Il faut avoir vu ces plans finaux où ces gens quittent pour toujours des lieux associés au bonheur, il faut les avoir vus entassés dans ces salles de classe, antichambres des camps de la mort...
Ce film peint le crépuscule d'un monde bientôt exterminé, des illusions bientôt détruites et il peint avec grâce cette tragédie de la fin de toutes les insouciances. Et de penser au Monde d'hier de Stefan Zweig...